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CSRD Reporting RSE

Reporting de durabilité : la CSRD adoptée par le Parlement européen

Les députés européens ont adopté, le 10 novembre, la directive CSRD (Corporate Sustainable Reporting Directive) par 525 voix pour, 60 voix contre et 28 abstentions. Ce vote consensuel témoigne de la volonté européenne de faire avancer les entreprises dans leur transition et en faire les acteurs majeurs du green deal européen. Près de 50.000 entreprises européennes devront divulguer tous les ans des informations et données sur leur impact social et environnemental, ainsi que sur les risques ESG auxquels elles sont confrontées.

 

CSRD adoptée
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CSRD et calendrier de mise en œuvre

L’entrée en vigueur de la CSRD va se faire de façon graduelle, afin de laisser le temps aux entreprises de se préparer à sa mise en œuvre. Il ne faudra cependant pas perdre de temps pour réfléchir au processus à mettre en place, avant de penser à élaborer son futur rapport de durabilité « mode CSRD ».

  • 04/2022 : publication par l’EFRAG du premier jeu des 13 ESRS ((European Sustainability Reporting Standards) appelés à définir le contenu des rapports de durabilité ;
  • 10/11/2022 : adoption de la CSRD par le Parlement européen ;
  • 28/11/2022 : adoption du dispositif par le Conseil européen, et suite à la publication au JO, la directive entrera en vigueur 20 jours après, et devra être transposée ensuite par les Etats membres dans un délai de 18 mois ;
  • 30/06/2023: Publication au JO de l’Union Européenne de l’Acte délégué pour le 1er jeu d’ESRS ;
  • 01/01/2024: applicabilité aux grandes entreprises de plus de 500 salariés déjà soumises à la directive NFRD pour publication en 2025. En France, la CSRD se substituera dans des conditions à déterminer à la Déclaration de Performance Extra Financière (DPEF) ;
  • 01/01/2025: nouveau ! Applicabilité pour les grandes entreprises qui ne sont pas actuellement soumises à la NFRD (avec plus de 250 salariés et/ou 40 millions d’euros de chiffre d’affaires et/ou 20 millions d’euros de total de bilan), avec des déclarations à publier en 2026 ;
  • 01/01/2026: applicabilité pour les PME et autres entreprises cotées, avec des rapports dus en 2027. Les PME peuvent s’abstenir jusqu’en 2028.

CSRD et double matérialité

Comme déjà évoqué dans de précédents articles, (L’analyse de double matérialité, socle de la future CSRD), l’Europe souhaite que le reporting de durabilité soit construit sur le principe de double matérialité.

Le concept de double matérialité prend en compte à la fois les risques environnementaux et sociaux auxquels sont confrontés les entreprises (matérialité simple, dite également matérialité financière) et les impacts de ces dernières sur l’environnement et la société (matérialité d’impact). Selon la vision européenne, les entreprises doivent rendre compte de leur responsabilité et de la durabilité de leur modèle auprès de toutes les parties prenantes et pas seulement aux seuls investisseurs.

Ce que Pascal Durand, (député Renew) rapporteur de la directive, a illustré en affirmant que “l’Europe montre ainsi au monde qu’il est effectivement possible de faire en sorte que la finance, au sens étroit du terme, ne gouverne pas l’ensemble de l’économie mondiale”.

La vison européenne va à l’encontre de ce qui est actuellement développé par l’ISSB (International Sustainability Standards Board) présidée par Emmanuel Faber, ex dirigeant de Danone. Cette organisation, émanation de l’IFRS, travaille également à produire une norme internationale de reporting extra-financier fondée sur le principe de la « matérialité simple » qui ne mesure seulement que l’impact des risques ESG sur l’entreprise et qui s’adresse qu’aux investisseurs qui prennent en compte les critères ESG.

La mise en œuvre de l’analyse de double matérialité n’a rien d’une simple formalité, d’un simple exercice de conformité réglementaire. L’analyse de double matérialité à produire va nécessiter un travail supplémentaire pour les entreprises qui répondent depuis 4 ans à la DPEF, avec, sans mauvais jeu de mots, un fort impact sur l’ensemble du contenu du reporting de durabilité. La prise de connaissance du draft de l’ESRS 2 « General, strategy, governance and materiality assessment » est indispensable pour évaluer le travail qui sera à produire, bien qu’il ne s’agisse que de la version projet.

CSRD et PME

Quant aux entreprises de plus de 250 salariés qui répondent aux seuils précédemment évoqués, elles devront donc publier leur première CSRD sur l’année fiscale 2025 en 2026. L’analyse de double matérialité constituera pour la majorité d’entre elles, une vraie nouveauté. Au même titre que le reporting de durabilité dans son intégralité.

Au moment où nous publions ce nouvel article, combien de ces entreprises sont informées de cette évolution réglementaire ?  La semaine passée, Ouest France, premier quotidien français, a publié un article sur la CSRD. Une belle initiative qui gagnerait à être relayée par les autres quotidiens de la presse régionale.

Pour ces entreprises, la nouvelle CSRD constitue un véritable enjeu. Pour celles qui évoluent dans l’univers « BtoB », elles vont, avant même de devoir travailler à leur propre rapport de durabilité, être questionnées par leurs grands donneurs d’ordre. En effet, avec la CSRD, toutes les entreprises assujetties doivent prendre en compte dans leur analyse de double matérialité, comme dans leur engagement sur des trajectoires de transition, l’ensemble de leur chaine de valeur. A titre d’exemple, il ne suffira plus demain de prouver que l’on a fait un bilan de Gaz à Effets de Serre (GES), mais de montrer que l’on suit ses émissions, avec des données fiables, et que l’on entreprend de les réduire.

Les PME impactées vont devoir mettre en place une gouvernance de leur stratégie RSE. Voire pour certaines d’entre elles, formaliser leur politique RSE si cela n’a pas encore été fait. Elles devront ensuite mettre en place un processus de reporting robuste afin de répondre aux sollicitations de leurs clients comme précédemment évoqué et pour répondre à leur propre obligation. Vaste sujet qui requiert la plus grande attention et des moyens dédiés.

Comme l’a rapporté Ouest France “C’est l’entrée de l’entreprise dans le monde post-accord de Paris avec l’obligation de définir des plans de transition, d’expliquer ce qu’on fait sur les questions climatiques, environnementales, mais également les questions de biodiversité et les droits humains. C’est une nouvelle conception du rôle de l’entreprise dans la société​” selon l’Eurodéputé Pascal Durand.

 

Article rédigé par

Bertrand Desmier