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DPEF – acte II : impacts sur le reporting et le(s) rapport(s)

La transposition de la Directive européenne dans notre droit correspond à une évolution des mentalités à l’égard des éléments extra-financiers. Les organisations patronales reconnaissent l’apport des capitaux immatériels au capital matériel de l’entreprise. Avec la DPEF, l’intention est de passer de l’exhaustivité précédemment exigée par l’article 225 du Grenelle 2, dans une approche « passive » de la conformité réglementaire, à une concision porteuse de sens pour l’entreprise et l’ensemble de ses parties prenantes, dans une approche « proactive » de la conformité réglementaire. La DPEF implique donc de passer d’un reporting de conformité, à un reporting de transformation et d’engagement. Quels sont les impacts de cette nouvelle législation sur la mise en œuvre des reporting et rapports extra-financiers ?

Voici un compte-rendu de la table ronde organisée dans le cadre du Salon Produrable le 04/04/2018. Les intervenants étaient : Bernard Fort (Président du directoire Tennaxia) – Aloys Guitton (Directeur RSE corporate Auchan Retail)- Tristan Mourre (Directeur, Responsable offre RSE Grant Thornton) – Bertrand Desmier (Directeur de la Business Line RSE Tennaxia).

 

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DPEF : vers un reporting de pilotage et de transformation

Pour Tristan Mourre, la DPEF fait de la cartographie des risques la clé de voute du reporting : fonction, fréquence, dimension, organisation. Ainsi la DPEF est l’opportunité de revoir son reporting pour en faire un véritable outil de pilotage et de mesure de la performance. L’approche du vérificateur devra aussi être adaptée en intégrant les résultats de l’analyse des risques par entreprise pour un audit pragmatique, flexible et plus efficace, en vérifiant et validant la robustesse et la fiabilité des données et des informations.

Si la DPEF n’impacte pas les procédures de collecte et de validation poursuit Bertrand Desmier, en revanche, il y a une opportunité d’introduire des éléments concernant le pilotage des  indicateurs clés de performance, en intégrant les chefs d’établissement, et en revoyant  la périodicité de la collecte des KPIs, car la collecte annuelle n’a plus de sens pour les KPIs. Cela induit un véritable accompagnement du changement pour piloter la performance extra-financière ; un reporting RSE vecteur de pilotage et de transformation… cela ne se décrète pas ! Il estime que la DPEF représente par ailleurs une opportunité pour procéder à un nettoyage du référentiel d’indicateurs, pour coller à l’analyse de matérialité et pour les indicateurs opérationnels, revoir les définitions en leur donnant davantage de sens et en visant par là même un meilleur taux de couverture.

Aloys Guitton ajoute qu’il faut impliquer davantage les collaborateurs au pilotage de la performance. Par exemple, directeurs ou directrices d’établissements n’ont pas été intégrés à la campagne de réduction de la consommation d’énergie, alors que chacun d’entre eux peut agir à l’échelle locale. Il faudrait donc que chaque directeur d’établissement puisse avoir une visibilité sur les indicateurs de performance extra-financière et les considère comme des indicateurs à part entière. Il ne faut pas présenter l’évolution du reporting RSE comme le fait d’une obligation légale. Il faut la rattacher aux valeurs de l’entreprise, à sa stratégie. Dire ce que l’on peut gagner. Il y a un vrai devoir de pédagogie, et surtout, il faudra être simple, ne surtout pas en faire  une affaire de spécialiste.  La pédagogie et le pilotage, complète Bertrand Desmier, nécessite d’avoir des tableaux de bord de KPIs pertinents, avec un rôle prépondérant de la data visualisation. Tristan Mourre complète en insistant sur ce qu’est un bon indicateur, celui qui parle à tout le monde, est corrélé au business, peut être objectivé et qui mesure la performance au fil de l’eau, est un critère d’attribution de la rémunération variable des managers impliqués.

Pour les trois intervenants, une des solutions pour mieux impliquer les managers pourrait être d’intégrer des critères RSE dans les critères variables de rémunération, en plus de la présentation des tableaux de bord en revue de direction corporate et sites. Les auditeurs internes pourraient de leur côté être amenés à jouer un rôle plus actif sur le suivi des indicateurs clés de performance extra-financière. Pour cela, il faut être clair et transparent sur le référentiel RSE mis en place ainsi que sur les politiques déployées. Tristan Mourre souligne le fait que l’OTI n’est pas le « validateur suprême ». Il permet une fiabilisation de données, mais l’important est la complémentarité entre la vision micro des collaborateurs et macro de l’OTI.

 

Quelle place pour le rapport intégré ?

Les rapports à venir seront centrés sur la matérialité corrélée aux risques et sur la pertinence pour les parties prenantes. Bertrand Desmier précise que si la Déclaration de Performance Extra-Financière s’inscrit dans la perspective du rapport intégré, il n’y a cependant aucune obligation en France de publier des rapports intégrés, et que ce type de reporting n’est pas une fin en soi. Il doit être le produit d’une pensée intégrée ce qui induit implication de la direction de l’entreprise et transformation à mettre en œuvre et piloter.

Pour Tristan Mourre, cette nouvelle règlementation met sur le même plan les performances financières et extra-financières, ce qui est un premier pas vers la généralisation de la pensée intégrée. Il rappelle également que les organismes tiers indépendants vont évaluer la conformité et la sincérité des DPEF, et donc leur accessibilité pour l’ensemble des parties prenantes. Cela implique de connaître leurs demandes. Aloys Guitton poursuit en indiquant que le bon rapport, qui répondra à la DPEF, c’est celui qui donne une vision claire, de la stratégie et des perspectives de l’entreprise, qui permettra de comprendre l’entreprise, en montrant que les sujets extra-financiers sont aussi importants que les autres. Le fait de publier des données et des informations matérielles et de garder cette publication sur 5 ans, donnera de la mémoire aux gens qui analyseront les données publiées.

Bertrand Desmier imagine à terme un rapport intégré central avec différentes déclinaisons selon le type d’informations et le degré de spécificité recherchés.

 

En conclusion

Les rapports vont de plus en plus être à géométrie variable, mais ne doivent pas perdre en cohérence. Chaque entreprise va donc devoir trouver son propre équilibre.