GRTgaz est le principal opérateur français de transport de gaz, acteur de la sécurité énergétique du pays, engagé dans le développement de solutions gazières d’avenir décarbonées. Il assure une mission de service public visant à garantir la continuité d’acheminement du gaz. Depuis de nombreuses années, l’entreprise s’est engagée dans la transition énergétique en accompagnant le développement des gaz renouvelables et de l’hydrogène bas-carbone. En 2020, l’entreprise a défini sa raison d’être et l’a inscrite dans ses statuts : « Ensemble, rendre possible un avenir énergétique sûr, abordable et neutre pour le climat ».
L’actuelle politique RSE, définie en 2021, décline la raison d’être et est orientée autour de 10 engagements priorisés et concrétisés à travers des objectifs chiffrés à horizon 2024 ou 2030, contribuant à répondre aux Objectifs de Développement Durable définis par les Nations Unies.
En 2021, l’entreprise a souhaité aller encore plus loin en optant pour la mise en place d’un pilotage intégré de la performance financière et extra-financière. GRTgaz a confié à Tennaxia l’élaboration et la rédaction de son rapport intégré. Motivations, enjeux, méthodologie, bénéfices… Christophe Delfeld, Directeur de la RSE de GRTgaz et Mélanie Deal, consultante senior RSE chez Tennaxia nous expliquent les détails de leur collaboration.
GRTgaz vient de publier son premier rapport intégré. Pourquoi ce choix ?
Christophe Delfeld : Quand on s’appelle GRTgaz, on est sur une activité sensible par nature. Notre objet social historique, transporter du gaz naturel, questionne forcément au regard des objectifs de neutralité carbone en 2050. Donc il est important pour nous de démontrer comment, avec sincérité, l’entreprise s’est engagée sur un chemin de transformation. Dans ce cadre, l’entreprise s’est aussi dotée d’une raison d’être, qui découle directement de la loi Pacte, et au travers de cette boussole de long terme, qui crée pour GRTgaz au-delà de sa mission historique une finalité environnementale, il y a une volonté et une philosophie sincère de plus grande transparence. C’est un acte de transparence pour rendre compte de la réalité de notre transformation et la partager avec nos parties prenantes.
Le groupe GRTgaz est déjà soumis à la DPEF (Déclaration de Performance Extra-Financière) depuis 3 ans. En quoi le rapport intégré diffère-t-il de la DPEF en termes d’approche ?
Christophe Delfeld : Clairement le rapport intégré va plus loin que la DPEF. Son objectif est d’apporter une vision beaucoup plus globale de la réalité et de la performance financière et extra-financière de l’entreprise. Pour cela, il se base sur un référentiel beaucoup plus exigeant qui va élargir le scope des sujets abordés, puisqu’au-delà du focus sur l’analyse de matérialité, les plans d’action, et les résultats au regard de ces actions, on remonte la chaîne. On a un regard beaucoup plus approfondi sur l’environnement de l’entreprise, sa stratégie, les tendances qui peuvent affecter sa stratégie, bien sûr l’identification des grands enjeux RSE et puis aussi ce zoom sur la gouvernance : comment l’entreprise se met en ordre de marche pour piloter cette transformation.
Mélanie Deal : Il faut savoir que la DPEF, historiquement, s’est inspirée du cadre du reporting intégré. Comme l’a dit Christophe, il va plus loin que la DPEF. On va démontrer comment la stratégie RSE de l’entreprise est intégrée à la stratégie. Par exemple, au niveau de la gouvernance, l’entreprise va montrer comment ses instances décisionnaires sont alignées avec sa stratégie, avec notamment des rémunérations indexées sur des critères extra-financiers et pas seulement financiers. Le rapport intégré consiste à montrer la création de valeur réalisée par l’entreprise à la fois pour elle-même et pour l’ensemble de ses parties prenantes, que ce soient ses salariés, ses actionnaires, ses clients, ses fournisseurs… vraiment tout son écosystème.
Concrètement, quelles ont été les différentes étapes, la méthodologie employée pour construire ce rapport ?
Christophe Delfeld : La force de l’approche, ça a été de partir tout simplement d’une approche pragmatique à travers une démarche de benchmark. Au regard du référentiel du rapport intégré, nous avons regardé où en était GRTgaz sur chacune des grandes briques constitutives. Pour faire cette analyse, Tennaxia a apporté sa connaissance du secteur, donc un benchmark riche qui a permis d’aller chercher, sur chacune des briques, les meilleures pratiques et donc de faire l’analyse des écarts : quel est le gap entre là où j’en suis aujourd’hui et idéalement où je peux arriver en menant un certain nombre de travaux. Ça a été la première étape dont on a déduit un plan de travail calé sur le futur plan détaillé du rapport intégré cible. Et puis dans une deuxième étape, on est rentré dans une phase plus collaborative, c’est ça aussi qui était intéressant. Elle a impliqué beaucoup de directions et collaborateurs de l’entreprise où, sur chacune des thématiques à approfondir, on a constitué avec Mélanie des groupes de travail, pas forcément pléthoriques. C’étaient des groupes avec des gens connaisseurs du sujet, de 5 ou 6 personnes impliquées sur le sujet, pour élaborer le contenu, toujours en s’inspirant des meilleures pratiques pour construire ce qu’on allait montrer et raconter sur chacune des grandes briques. Le processus a démarré au Printemps 2021. Tout cela nous a amené à avoir la matière disponible à l’horizon d’octobre, et puis on a pu passer dans la phase vraiment rédactionnelle, un peu plus créative, en parallèle d’un travail avec une agence de communication pour créer des infographies pédagogiques jusqu’à aboutir en début d’année [2022] à la production du rapport intégré.
Mélanie Deal : On a fait ce rapport intégré par rapport au contexte de GRTgaz cité par Christophe, mais aussi dans l’idée de progresser sur le chemin de la pensée intégrée. Il faut donc déjà qu’il y ait une appropriation du concept par les équipes. On a commencé par sensibiliser les équipes à ce qu’était le rapport intégré, le référentiel, en quoi il va plus loin que la DPEF qui était un exercice auquel les équipes commençaient à être habituées. Ça a été la première étape pour fédérer les équipes autour de ce projet. Et ensuite, comme l’a dit Christophe, on a fait un gap analysis pour montrer quels étaient les points forts et les axes de progrès sur la future production du rapport intégré et sur le chemin de la pensée intégrée pour GRTgaz. On a donc travaillé avec plusieurs types d’instances. A chaque fois sur ce type de rapport, on doit avoir une validation par les instances décisionnaires de GRTgaz. Nous sommes passés en COMEX pour faire valider le plan d’action. Ensuite on a organisé des ateliers par chapitre du rapport intégré où toutes les directions étaient représentées : RH, stratégie, finance… On avait aussi une originalité pour un rapport intégré : GRTgaz n’est pas une entreprise cotée. Elle fait partie du groupe Engie. On a voulu faire un rapport intégré incluant la DPEF. C’est une originalité mais c’est aussi du pragmatisme par rapport à la taille et au contexte de l’entreprise.
Christophe Delfeld : Effectivement, en amont il y a eu ce questionnement pas simple où le cœur balançait entre la lecture un peu stricte sur le fait qu’en principe le rapport intégré existe à côté de la DPEF, et finalement cette approche pragmatique et innovante. Je ne sais pas si beaucoup d’entreprises le font. On a fait un deux en un, un rapport intégré qui embarque la DPEF. Ce qui a été important tout du long, c’est effectivement le travail de pédagogie et de sensibilisation, déjà du comité RSE. Dans ce comité, vous avez des personnes, les pilotes d’engagements RSE, qui sont par ailleurs très sollicitées donc il a fallu aller les convaincre de l’intérêt de faire ce travail, expliquer le pourquoi. Et puis aussi avec le COMEX, leur montrer à mi-parcours « voilà ce sur quoi on va communiquer demain, vous avez bien conscience qu’on va parler de ça ? ». Forcément ça questionne un peu : « Pourquoi on a besoin d’aller aussi loin dans la transparence ? » Donc là il faut expliquer, argumenter, ça fait partie des étapes intermédiaires importantes en parallèle du travail de fond.
Mélanie Deal : Effectivement un COMEX peut avoir « envie d’y aller » mais quand on est dans le concret, on peut être amené à toucher à des sujets parfois sensibles. Dans une entreprise non cotée, ce sont des sujets qui ne sont pas toujours communiqués publiquement. Ça ne veut pas dire qu’ils ne veulent pas le faire mais il faut prendre des décisions. Il a donc fallu montrer les enjeux et les intérêts pour chacun, pour qu’il y ait une acceptation et surtout une mobilisation.
Comment la finance a-t-elle été intégrée au rapport ?
Christophe Delfeld : La finance a été intégrée de deux manières. La manière la plus simple, c’était bien sûr de rajouter, dans le rapport intégré, une partie dédiée à la performance financière. Donc de manière assez classique, GRTgaz a décrit avec quelques tableaux et graphiques sa performance financière de 2021, mise en perspective sur 3 ans. Ensuite il y a un autre angle qui était nouveau dans l’approche. C’était l’idée de commencer à expliquer que l’économique et l’extra-financier se retrouvent au cœur d’un certain nombre d’enjeux RSE de GRTgaz. Deux exemples me viennent en tête. On a par exemple un engagement sur l’énergie abordable : comment GRTgaz met en œuvre des actions pour maîtriser sa compétitivité puisqu’au bout du compte, c’est un système tarifaire, et si nos coûts augmentent rapidement, c’est le prix du gaz qui augmente au final. On voit la sensibilité sur le sujet aujourd’hui, il n’y a qu’à regarder l’actualité. C’est là où l’on voit qu’on est à la croisée d’un enjeu économique et d’un enjeu RSE puisqu’indirectement, cela nous amène sur le sujet des actions qu’on va mener en matière de performance pour contenir nos coûts. On est dans un moment où l’on constate déjà la baisse des consommations, et par conséquent la baisse de nos revenus. On doit donc mener des actions de performance pour tenir le tarif régulé. Un deuxième exemple : le gros enjeu de LT, c’est le raccordement des installations de production de gaz renouvelables, la méthanisation par laquelle on produit du gaz à partir de déchets agricoles, etc. L’engagement que l’on a pris, c’est de baisser de 20% en 4 ans le coût des installations d’injection dans les réseaux de gaz. Ce sont des installations qui réceptionnent le gaz, qui le filtrent, qui le traitent pour qu’il soit aux normes du gaz qu’on livre ensuite à nos clients. Donc là encore on est à la croisée de l’économique et des enjeux du développement durable via les gaz renouvelables.
On voit aussi se développer dans plusieurs rapports intégrés l’idée de la valeur partagée. Apporter de l’information pour démontrer que la valeur que l’on créée via notre chiffre d’affaires se répartit d’une certaine manière entre les différentes familles de parties prenantes, et qu’à la fin, l’image rendue est globalement équilibrée, pour faire court « tout ne va pas dans la poche des actionnaires », mais que l’on a un modèle d’affaires contribue à plusieurs familles de parties prenantes.
Mélanie Deal : Ce qui est vraiment intéressant chez GRTgaz, c’est que l’on a un responsable RSE qui est très actif et qui va mobiliser l’ensemble des directions dans la conduite du changement et la finance en fait partie. Dans les risques RSE lors de l’analyse de matérialité et dans la formalisation de la stratégie de GRTgaz, on a vraiment eu des enjeux à la croisée entre la performance et des notions d’énergie abordable et durable, de répartition de la création de valeur entre les parties prenantes, donc on est sur des éléments assez forts. Et puis on rejoint aussi le fondement même de la pensée intégrée en se disant « Quand j’ai des investissements à faire, comment prendre en compte le respect des objectifs fixés dans ma stratégie RSE ? ». Typiquement l’empreinte carbone est un enjeu très fort pour GRTgaz : comment GRTgaz va tracer ses investissements pour respecter sa trajectoire bas carbone. Là, on voit qu’on est dans l’intégré.
Christophe Delfeld : Mais restons humble, nous sommes sur un chemin de progrès. A l’arrivée, dans le rapport, on a 4 pages clairement identifiées sur le financier et 60 sur l’extra-financier. Mais il y a des sujets qui vont nous amener à renforcer cette dimension. Il y a notamment la taxinomie européenne où il va falloir qu’on explique, parmi nos investissements, nos OPEX, nos CAPEX, notre chiffre d’affaires, quel est notre pourcentage d’activités éligibles, et alignées au regard des grands objectifs environnementaux, etc ; donc la réglementation va nous amener à renforcer cette partie qui est à la croisée des deux dimensions. C’est ça qui est intéressant, on communiquera sur du financier mais aussi sur des sujets très RSE, et une zone de recouvrement entre les deux, une zone d’imbrication qui commence à apparaître.
Qu’est-ce que la production de ce rapport vous a amené et comment a-t-il été perçu par le top management ?
Christophe Delfeld : Il faut bien voir le rapport intégré comme la partie visible d’une entreprise qui progresse, parfois sans le savoir, sur ce chemin de la pensée intégrée donc « comment j’intègre de plus en plus la dimension ESG dans le fonctionnement de l’entreprise, son pilotage, sa prise de décision, etc ». Donc ce que ça amène, et c’est important, c’est le questionnement et cela contribue, à son échelle, à la prise de conscience de l’importance de ce questionnement. Ensuite le rapport est là, c’est la partie visible. Le fait est qu’il a reçu un accueil extrêmement favorable du conseil d’administration. On a eu des retours très positifs de nos actionnaires qui ont souligné à la fois l’exemplarité et la maturité de GRTgaz sur le sujet du reporting extra-financier et sur le contenu du rapport pour une entreprise de notre taille et non cotée. C’est donc un grand satisfecit du conseil d’administration qui considère que GRTgaz se situe dans les meilleures pratiques aujourd’hui. Ce sont dans notre cas des actionnaires de référence [Engie, la CDC et CNP Assurances], y compris des investisseurs « publics » qui expriment de plus en plus, vis-à-vis de leur portefeuille d’actifs des exigences extrêmement élevées sur la qualité de leur reporting extra-financier et sur le fond en lien bien sûr avec la taxinomie européenne. Eux-mêmes visent à atteindre un portefeuille d’investissements alignés avec les accords de Paris donc toute la mécanique se met en place. On a cet outil pour rendre compte qui coche la case « on y voit clair sur ce que vous faites ».
Autre point positif : la direction de la communication qui acte le fait que ce rapport intégré est une source, j’ai même envie de dire une mine d’information pour nourrir la façon dont on va parler de l’entreprise désormais ou en tout cas pendant l’année 2022. Après il y a toujours des bémols. Effectivement quand le rapport sort on se rend compte de la masse d’informations que l’on met à disposition des parties prenantes. Il y a donc eu ponctuellement quelques réactions de surprise ou parfois de requestionnement donc là il faut rester droit dans ses bottes et rappeler la démarche de fond, l’engagement de transparence, le référenciel etc. et rester ouverts aux ajustements.
Ce rapport semble être le fruit d’un travail très collaboratif entre vous. En quoi cela vous a-t-il aidé à produire la réflexion et le document ?
Christophe Delfeld : Ce travail s’inscrit dans une collaboration plus longue et Mélanie a une connaissance de GRTgaz, de ses problématiques qui est fine. Donc forcément ça met de l’intelligence dans la collaboration. Ce travail a permis de mobiliser beaucoup de directions : il y a au moins un représentant de chaque direction qui contribue. Cela permet aussi de diffuser cette dimension culturelle autour du rapport intégré et ce que ça implique en termes de communication, de reporting extra-financier, etc. L’apport de Tennaxia et donc Mélanie via son questionnement et son benchmark, ça a été de faire progresser notre façon de communiquer, de formaliser où on en est sur notre stratégie. L’atelier sur les parties prenantes a été assez marquant. On n’avait pas de vraie « cartographie chapeau », de synthèse, qui rendait compte de nos grandes familles de parties prenantes., de leurs attentes, des enjeux pour GRTgaz, les modalités de dialogue, notre performance par famille de parties prenantes… Je pense aussi à l’atelier sur les tendances susceptibles d’affecter le modèle d’affaires de GRTgaz. C’est un travail utile que l’on reprend aujourd’hui lorsqu’on parle de stratégie.
Mélanie Deal : Oui c’est un travail très collaboratif. Avec Christophe maintenant, nous nous connaissons bien, on travaille ensemble depuis 5 ans et cela joue aussi dans la relation. C’est un message important à passer pour l’ensemble des entreprises : en tant que consultants, on est là pour apporter de la méthodologie, animer, conduire le changement, challenger l’entreprise évidemment, mais nous ne sommes pas experts de l’entreprise, de ses métiers. Donc nous sommes dans des démarches de co-constructions avec des expertises métiers, des sujets transversaux. Si on n’a pas le client et les équipes en face qui s’investissent avec nous pour nous donner la matière sur ce qu’ils font et comment ils voient les choses c’est compliqué… Notre valeur ajoutée, c’est que l’entreprise soit autonome dans ses fonctionnements ensuite. C’est à elle de mettre en place la démarche. Nous sommes là pour les accompagner mais on ne peut pas faire à la place de l’entreprise. Sinon ça ne serait qu’un rapport de communication. Dans tout le rapport intégré, dès la conception, on a travaillé en co-construction. Avec Christophe, on a un responsable RSE qui est très impliqué. Dans les phases intenses du rapport, on se parle 3 à 5 fois par semaine. C’est quelqu’un qui porte le sujet parce que c’est de la conduite du changement. Du coup on est main dans la main, on n’est pas dans une relation de client-prestataire. On est dans une relation de partenaire. C’est vraiment la dimension de la réussite d’un projet, sa valeur ajoutée tant pour nous en tant que consultants que pour le client. Par exemple Christophe m’a fait intervenir avec lui au niveau des instances décisionnaires, au COMEX. Le fait d’être extérieur à l’entreprise permet aussi de soutenir le responsable RSE…
Christophe Delfeld : …et d’apporter une parole d’expert au COMEX sur les attendus du rapport intégré. C’est le rôle du COMEX que de challenger donc c’est important de nourrir le propos. Je reviens aussi sur le côté cadencement. La réalité du quotidien des collaborateurs, quand vous êtes à la direction des opérations, des investissements, etc., c’est d’avoir le nez dans le guidon sur vos sujets. Donc prendre le temps du recul pour l’atelier qui va permettre de nous faire un joli rapport, ce n’est pas forcément facile à vendre, d’où l’importance du binôme : Mélanie apporte la méthodologie, le cadencement et le calendrier à tenir et le responsable RSE est là pour faire en sorte que globalement les personnes viennent autour de la table pour faire avancer les sujets. Et puis à la fin tout le monde est content de voir le résultat et fier du rendu. Là on a franchi une étape donc l’année prochaine ça sera plus simple, on sera dans une logique d’actualisation.
Mélanie Deal : Ce rapport intégré a aussi permis à GRTgaz de prendre de l’avance par rapport aux nouvelles réglementations CSRD qui vont arriver.
Et maintenant ?
Christophe Delfeld : Maintenant, il faut faire vivre le rapport donc a minima une fois par an sur chacune des briques, on va se questionner : « qu’est-ce que j’ai fait de plus, de différent cette année ». Le consultant peut continuer à apporter ses idées sur ce que font les autres et ça va continuer à nous questionner et à nous faire progresser en itérant, y compris avec le COMEX. Cela va nous faire progresser un peu de la même manière qu’un référentiel d’un label comme Bcorp ou une certification Ecovadis. Soit on fait la démarche pour cocher la case « je fais mon reporting extra-financier, je fais mon analyse de matérialité et je raconte tout un tas de choses », soit on essaie de connecter réellement ce rapport intégré avec la réalité de la démarche de l’entreprise et on instrumentalise le rapport intégré pour venir nous questionner, ce qui est plutôt ce que je fais. Et le chemin n’est pas fini. GRTgaz a bien progressé en passant d’une RSE réglementaire, volontaire, « je coche mes cases » à la phase où on est intégré. Il y a 5 ans on était dans une transition de la RSE. C’était encore l’esprit « article 225 », on rencontrait la quinzaine de responsables et on rendait donc les 15 KPIs et voilà. Je caricature parce qu’on avait quand même la première analyse de matérialité qui est arrivée à ce moment-là et qui apportait un peu plus d’intelligence. Aujourd’hui, avec ce rapport, on a intégré la RSE dans la stratégie. Mais moi je considère qu’aujourd’hui, on entre dans le dur. Maintenant, quand on dit « pilotage intégré », il faut qu’on aille plus loin, que le logiciel « ESG » percole dans toutes les directions, les processus métiers etc…. Dans ce sens, une direction Finance / RSE va être créée dans quelques mois avec un membre de COMEX. Les deux fonctions se rapprochent et le directeur financier va s’appuyer sur un directeur financier et un directeur RSE. On formera un trio. Dans la phase où l’on entre, c’est bien de mettre le centre de gravité là pour diffuser la RSE dans les mécanismes de prise de décisions, le pilotage, le reporting… Les leviers de pilotage mettront le financier et l’extra-financier au même niveau.
Mélanie Deal : Effectivement la notion de pragmatisme est attendue par les entreprises et aussi le fait que la RSE soit rattachée au business model des entreprises. C’est la raison d’être qui amène ce questionnement : « par rapport à la stratégie, est-ce que le business model va dans le sens de la durabilité ou non ». C’est la vraie question. GRTgaz a vraiment un business model de transformation et c’est ce chemin là que les entreprises doivent faire. De plus en plus de directeurs de la transformation ou de directeurs financiers nous appellent. Eux ont besoin aussi qu’on leur parle business, qu’on y rattache la RSE et que ça ne soit pas une stratégie à côté mais vraiment à l’intérieur du business model de l’entreprise.
Christophe Delfeld : La clé est dans le mot « intégré ». Avec le mot « impact », ce sont les mots centraux de la fonction RSE aujourd’hui.
Retrouvez les temps forts de cette interview en video :
Les intervenants :
Christophe Delfeld, Head of CSR and Stakeholders Management chez GRTgaz
Mélanie Deal, Consultante RSE chez Tennaxia