Deux éléments majeurs vont impacter les reporting et rapports extra-financiers de l’exercice 2017. La transposition de la Directive Européenne et la loi sur le devoir de vigilance. Deux facteurs de profond changement, à prendre en compte dès maintenant pour être fin prêt au début du quatrième trimestre prochain. Le reporting RSE 2016 s’achève. Les attestations de présence et avis de sincérité ont été délivrés. Les OTI restituent en ce moment même leur management letters. Les deux évolutions réglementaires y sont invariablement signalées, afin que les directions développement durable et l’ensemble de la communauté des rapporteurs établissent leur feuille de route.
Transposition de la directive européenne, cap sur la matérialité
La consultation publique sur le projet d’ordonnance et de décret prenant en compte la transposition de la Directive Européenne sur la publication des informations extra-financières a pris fin début mars. La publication des textes serait l’affaire de quelques semaines. Des semaines qui comptent dans la préparation d’un reporting RSE. S’il faut prévenir plutôt que subir, partons du principe que les versions définitives confirmeront les deux projets.
Ce qui devrait changer en matière de Reporting RSE
Sur les recommandations de la Plateforme RSE, toutes les entreprises non cotées devront publier les mêmes informations que celles exigées des entreprises cotées ; fin de la double liste.
Il n’y aurait plus d’exclusion statutaire ; les SAS et SARL seraient donc désormais concernées. Restons quand même prudents sur ce point. Les travaux préparatoires de la plateforme RSE n’avaient pas fait consensus. Mais si le texte ne bougeait pas, cela changerait la donne pour un grand nombre d’entreprises.
En l’état des projets de texte d’ordonnance et de décret d’application soumis à consultation, le reporting RSE 2017 devrait présenter :
- La déclaration sur la performance non financière qui présente le modèle commercial de la société,
- les risques significatifs suscités par l’activité de la société, y compris lorsque cela s’avère pertinent et proportionné, les risques créés par ses relations d’affaires, ses produits ou ses services,
- une description des politiques appliquées par l’entreprise incluant, le cas échéant, les procédures de diligence raisonnable mises en œuvre pour prévenir, identifier et atténuer la survenance de ces risques,
- les résultats de ces politiques incluant des indicateurs clés de performance ;
- en l’absence de politique sur un ou plusieurs risques, une explication claire et motivée des raisons le justifiant.
Une nouvelle notion apparait, la « performance non financière », pendant de la performance financière et qui, avec la présentation du modèle commercial, s’inscrit dans la trajectoire du reporting RSE intégré.
Les « risques significatifs » renvoient à la méthodologie utilisée pour les identifier et qui devra être publiée par les entreprises. Le groupe de travail Vérification du reporting RSE se tiendra le 24 avril prochain à l’Afnor. Au programme ? Notamment les modalités de vérification de l’analyse de matérialité par les OTI. La pertinence de l’analyse de matérialité pour répondre à cette nouvelle obligation est donc d’ores et déjà validée par les OTI. Ce qui signifie que les OTI auront donc à connaître l’approche méthodologique des analyses de matérialité.
Le devoir de vigilance validé par le Conseil Constitutionnel
Les sages de la rue Montpensier ont validé l’obligation pour les entreprises employant plus de 5 000 salariés en France (10 000 avec leurs filiales étrangères) de mettre en place des plans de vigilance ; soit environ 200 entreprises. Si le caractère dissuasif et répressif de la loi votée le 21 février a été retoqué, le caractère incitatif est entièrement préservé.
Les entreprises visées devront établir et mettre en œuvre de manière effective un plan de vigilance, lequel devra comporter des mesures de vigilance raisonnable propres à identifier et à prévenir la réalisation :
- de risques d’atteintes aux droits de l’Homme et aux libertés fondamentales ;
- de dommages corporels ou environnementaux graves ;
- de risques sanitaires ;
- de comportements de corruption active ou passive.
Rappelons ici que le plan de vigilance, élaboré avec les parties prenantes, devra prévoir :
- La cartographie des risques (qui renvoie à l’analyse de matérialité puisque prise en compte des parties prenantes ce qui est rarement le cas des cartographies de risques classiques) ;
- La procédure régulière d’évaluation de la situation des filiales et sous-traitants ;
- Les actions adaptées d’atténuation des risques ou de prévention des atteintes graves ;
- Le mécanisme d’alerte et de recueil des signalements relatifs à l’existence ou à la réalisation des risques, en concertation avec les organisations syndicales ;
- Le dispositif de suivi des mesures mises en œuvre et d’évaluation de leur efficacité.
Le projet de décret précédemment abordé précise « une description des politiques appliquées par l’entreprise incluant, le cas échéant, les procédures de diligence raisonnable mises en œuvre pour prévenir, identifier et atténuer la survenance de ces risques ».
La publication tardive, le 19 août 2016 de l’article 173 de la loi sur la Transition Énergétique pour la croissance verte, avec effet rétroactif au 1er janvier, a posé quelques difficultés aux entreprises soumises au décret n°2012-557 du 24 avril 2012 relatif aux obligations de transparence des entreprises en matière sociale et environnementale. Si le devoir de vigilance n’affecte qu’un nombre limité d’entreprises, la transposition de la Directive Européenne en revanche, concerne toutes les entreprises soumises au décret précité.
Deux dimensions sont habituellement utilisées pour la réalisation des analyses de matérialité. Il existe une troisième dimension, qui permet d’appréhender la notion de risque via la maîtrise des enjeux. Cette analyse de matérialité permet aux entreprises de challenger leur politique RSE et de définir les indicateurs clés de performance qui devraient faire l’objet d’une publication pour l’exercice 2017. Elle permet aussi aux entreprises qui n’auraient pas encore formalisé leur politique RSE de le faire sur la base d’enjeux probants et pertinents.
En conclusion
Alors que convient-il de faire ? Anticiper dès à présent ou attendre… au risque de ne pas être prêt ? Ne pas être prêt, faute de temps pour réaliser son analyse de matérialité, définir ses risques, identifier ses indicateurs clés de performance puis collecter les données quantitatives et les informations qualitatives à publier début 2018. Resterait également la possibilité de repousser cette évolution à 2018, en expliquant les raisons pour lesquelles l’entreprise n’a pas été en mesure de faire ce travail sur 2017.
Le compte à rebours a d’ores et déjà commencé !