Le Parlement européen et le Conseil de l’UE sont parvenus à un accord politique sur la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), en attendant qu’elle soit formellement votée et transposée. Dans le même temps en France, le nouveau décret relatif aux bilans d’émissions de gaz à effet de serre a été publié le 1er juillet. Le même jour, la Convention des entreprises pour le climat publiait 10 propositions pour engager les entreprises dans la transition climat.
On ne peut que se féliciter de cette convergence des décisions européennes et françaises sur les obligations de reporting ESG des entreprises, avec en complément, le fruit des réflexions et travaux menés par 150 dirigeantes et dirigeants d’entreprise au sein de la Convention des Entreprises pour le Climat (CEC). Stratégies d’atténuation et d’adaptation au changement climatique sont désormais mieux cadrées, avec à la clé, implication de la gouvernance, transparence, fiabilité et comparabilité des données.
CSRD : les nouvelles règles de publication des rapports de durabilité sont désormais connues
- 2024 : pour les entreprises déjà concernées par la NFRD (DPEF en France) pour publication en 2025 ;
- 2025 : pour les entreprises qui n’étaient pas concernées et qui dépassent 2 des 3 seuils suivants : +250 collaborateurs, 40m€ CA ou 20m€ de bilan – pour publication en 2026 ;
- 2026 : pour les PME cotées, avec une dérogation possible jusqu’en 2028, tout comme les établissements de crédit de petite taille et non complexes et pour les entreprises captives d’assurance.
- 2028 : pour les entreprises non européennes ayant une activité substantielle sur le marché de l’UE (150 millions de chiffre d’affaires annuel) pour publication en 2029.
CSRD et changement climatique
Concernant le changement climatique, les entreprises devront rendre compte de leurs émissions GES dans le cadre de leurs stratégies d’atténuation et d’adaptation au climat. Ce faisant, les plans de transition climat devront inclure des informations relatives aux émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble de la chaîne de valeur, soit les scope 1, 2 et 3, pour les trois dernières années par rapport à une année de référence.
Pour le scope 3, elles devront fournir des informations en termes d’impact sur les catégories les plus significatives à savoir : 1) les achats en amont, 2) les produits vendus en aval, 3) le transport de marchandises, 4) les déplacements professionnels et 5) les investissements financiers.
Pour consulter le draft publié par l’EFRAG.
Décret BEGES et changement climatique
Le Décret n° 2022-982 relatif aux bilans d’émissions de gaz à effet de serre a été publié le 1er juillet pour application dès 2023.
Jusqu’à présent, les bilans d’émissions de GES s’appliquaient aux scopes 1 et 2 des émissions, c’est-à-dire aux émissions directes de gaz à effet de serre liées aux activités et aux émissions indirectes de CO2 liées à la production d’énergie, sous forme d’électricité ou de chaleur. Il devait servir à l’élaboration d’un plan d’action pour les entreprises de plus de 500 salariés et de plus de 250 salariés en Outre-Mer.
Désormais, le nouveau décret étend le périmètre des émissions de gaz à effet de serre à prendre en compte à celles du scope 3, soit à l’ensemble des autres émissions indirectes, pour les entreprises soumises à la déclaration de performance extra-financière (DPEF). On peut ici noter que la CSRD impliquera les entreprises de plus de 250 salariés réalisant 40m€ de chiffres d’affaires ou 20m€ de bilan. Ces entreprises devront elles aussi rendre compte de leurs émissions de scope 3.
Pour mémoire, la 9ème étude Tennaxia sur les pratiques de reporting et rapports RSE montrait que seulement 51% des entreprises de l’échantillon prenaient en compte le scope 3. On peut en déduire qu’une majorité d’entreprises vont devoir progresser sur le périmètre de leur BEGES. A noter qu’en cas de non-réalisation du Beges, l’amende est portée à 10 000 euros, voire au double en cas de récidive, contre 1 500 précédemment.
Accédez au décret.
Accédez à 10ème Etude Tennaxia.
Entreprises et changement climatique
Les 150 entreprises qui ont adhéré à la Convention des entreprises pour le climat, ont travaillé pendant près d’un an pour faire avancer le monde de l’entreprise en faveur du climat. Si le reporting ESG des entreprises ne figure pas au menu des 10 propositions finales, elles concernent tout particulièrement la gouvernance des entreprises. Or, la CSRD exige que les entreprises publient les éléments liés à la structure de gouvernance de l’entreprise et sur son contrôle interne et sa gestion du changement climatique.
On peut ainsi noter que plusieurs des 10 propositions auraient tout à fait leur place dans les premiers reporting ESG de l’ère CSRD qui seront publiés en 2025 :
- Formation obligatoire des décideurs économiques et des comités de direction aux enjeux de la transition écologique
- Formation obligatoire aux enjeux de la transition écologique pour les salariés et les représentants du personnel
- Formation des salariés aux gestes et compétences de la transition de demain
- Conditionner la rémunération des dirigeants à la réussite des critères environnementaux préalablement fixés
- Favoriser les mobilités moins polluantes en entreprise
- Accélérer la rénovation énergétique des bâtiments d’entreprise
- Disparition des niches fiscales nuisibles à l’environnement
Les 3 autres propositions concernent : l’imposition d’un bilan GES scope 3 pour les entreprises de plus de 50 salariés, une éco-conditionnalité de l’accès au marché et financement public et la création d’un indice R3 (Remploi, réparabilité, recyclabilité).
Accédez au draft de l’EFRAG.
Accédez au site de la CEC.
Dans un monde aux limites planétaires dépassées, ces nouvelles obligations et propositions sont de nature à permettre aux entreprises d’apporter une significative contribution aux nécessaires transitions énergétiques, écologiques et sociales. Sobriété organisée, entreprise contributive, entreprise régénératrice, de nouvelles voies sont possibles pour créer un nouveau modèle d’entreprise qui permette de faire vivre en harmonie les êtres humains et les écosystèmes, en produisant sans épuiser les ressources.
A suivre !