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CSRD, Tennaxia fait le point à Produrable

Produrable était une opportunité à ne pas manquer pour mieux appréhender les défis posés par la mise en œuvre de la CSRD. A cette occasion, Tennaxia proposait trois tables rondes qui y étaient dédiées. La première concernait la restitution de sa 12ème étude consacrée aux pratiques de reporting RSE, cette année intitulée « CSRD, où en sont les entreprises ». La deuxième était consacrée à l’audit de la CSRD et des plans de transition, quand la troisième abordait un retour d’expérience de trois entreprises nouvellement soumises.

 

CSRD et Produrable 2024

 

 

CSRD, où en sont les entreprises ?

L’étude 2024, réalisée avec BPI, LCL et en partenariat avec Orée, s’appuie sur un échantillon de 208 entreprises*. Si 54% des entreprises qui seront auditées en 2025 se jugent relativement bien informées, 27% expriment encore des doutes concernant les modalités de l’audit et 46% ont encore des doutes sur le fond et la forme du rapport de durabilité, voir infra.

L’implication de la gouvernance est en nette progression. Ainsi, on constate qu’un ou plusieurs membres du CODIR, COMEX ou conseil d’administration figurent dans l’équipe projet de la CSRD pour 89% des répondants. On note par ailleurs que 59% des entreprises du panel ont sensibilisé leurs organes de direction et 34% les ont formés. De plus, 32% des entreprises indiquent que les instances de direction sont plus impliquées sur les sujets RSE depuis la mise en œuvre de la CSRD.

Seulement 24% des entreprises répondantes ont déjà réalisé leur analyse de double matérialité, parmi lesquelles majoritairement, celles qui sont soumises sur l’année fiscale 2024. On peut s’étonner de ce résultat dans la mesure où l’analyse de double matérialité constitue le socle de la CSRD. Parmi ceux l’ayant réalisée, 55% affirment avoir pris en compte leurs parties prenantes dans l’identifications des IROs. 48% du panel sont en train de la réaliser ou l’ont programmée au cours de l’année 2024.

Comme l’année précédente, les entreprises considèrent le changement climatique comme le principal risque (98%), suivi par la main d’œuvre de l’entreprise (91%) et par la conduite des affaires (79%). L’ESRS E4 relatif à la biodiversité et aux écosystèmes se classe en 7ème position, avec 63% des entreprises le considérant comme matériel. De plus, 91% des entreprises calculent leurs émissions indirectes, 65% sont des ETI et 35% sont des grandes entreprises. En moyenne, les entreprises répondantes calculent leur empreinte carbone depuis 6 ans, avec 50% d’entre elles le faisant depuis 5 ans ou plus.

 

Audit de la CSRD et des plans de transitions

Une table ronde très attendue, tant la vérification des reporting de durabilité suscite inquiétude et perplexité de la part des entreprises soumises (voire de la part des auditeurs eux-mêmes). Une semaine après la publication par la Haute Autorité de l’Audit des lignes directrices des missions de certification des informations en matière de durabilité, les intervenants** sont venus apporter des éclairages appréciés par l’assistance.

En introduction, Olivier Arthaud évoquait le changement de dimension de la vérification de la CSRD par rapport à celle de la DPEF. Conformité aux ESRS, taxonomie et balisage constituent une profonde mutation, sans parler de ce qui mobilise en ce moment toutes les attentions pour les entreprises soumises cette année, l’analyse de double matérialité. Il a également évoqué les informations prospectives qu’il faudra prendre en compte.

Il a par ailleurs insisté sur la progressivité du contenu des vérifications jusqu’en 2028, date fixée pour passer en assurance raisonnable. Une progressivité qui s’inscrit pleinement dans l’esprit des lignes directrices publiées par la H2A ; « il ne s’agit pas de mettre les entreprises en difficulté ». Cette progressivité dans l’appréhension des vérifications, impactera le sujet de la marge d’erreurs acceptable comme celui de la comparabilité des données. Un fait nouveau, l’observation de faits délictuels qui s’inscrira dans la mission de vérification.

Pour sa part, Patricia Savin a relevé parmi les points de vigilance, la compréhension des ESRS, le contrôle interne, la collecte et la fiabilité des données. Sur le chapitre des ESRS, dont la lisibilité peut poser problème, avec un glossaire dont la praticité gagnerait à être améliorée, l’intervenante a signalé 3 publications de nature à aider les entreprises dans la compréhension de ce qui était attendu d’elles.

En premier lieu, la lecture des lignes directrices publiés début octobre par la H2A, qui fixent les modalités et contenu des missions de vérification. Les recommandations pragmatiques de Middlenext ainsi que le Q&A publié par l’Autorité des Normes Comptables (ANC), qui vient d’être mis à jour en octobre.

Sur le chapitre de la documentation attendue, Emmanuel Thierry a insisté sur le changement culturel imposé par la CSRD, notamment pour les nouvelles entreprises soumises. Une attention toute particulière sera portée sur les process de reporting. En l’espèce les Directeurs Administratifs et Financiers (DAF) sont parfaitement au fait des diligences mises en œuvre dans le cadre des audits financiers des Commissaires aux Comptes (CAC). Ce faisant le transfert de responsabilité observé des reporting de durabilité des directions RSE aux DAF devrait contribuer à faciliter les audits.

Toujours sur le thème de la documentation, il conviendra que les entreprises auditées puissent présenter une documentation probante en matière d’analyse de double matérialité. Les exclusions par ailleurs devront faire l’objet d’une documentation qui ne se réduise pas à un avis à dire d’expert. Il a par ailleurs abordé le sujet des rapports de durabilité. Là encore, la CSRD marque une véritable évolution culturelle. Si le narratif pourra être utilisé, on demandera à ce qu’il soit factuel, en rapport avec la matérialité des Impacts, Risques et Opportunités (IROs), en précisant par ailleurs que la comparabilité appelle à un langage commun.

Cette table ronde s’est achevée sur les recommandations des conférenciers. « S’assurer que le reporting soit descriptif, soutenu par des éléments probants – Justifier, prouver et tracer, les trois maitres mots de la vérification de la CSRD – S’entourer des bons conseils et des bons auditeurs dans des logiques constructives – Echanger avec ses auditeurs au fil de l’eau, étape par étape – Qui dit enfin transparence, dit donner aux auditeurs un accès en toute transparence à la solution logiciel de reporting ».

 

CSRD : retour d’expérience

Trois entreprises accompagnées par Tennaxia, qui seront soumises sur l’année fiscale 2025 pour publication en 2026, participaient à cette dernière table ronde. Pour ces trois entreprises, Delpharm, Talan et Greenyellow, anticiper l’obligation de reporting est indispensable à la réussite de la mise en œuvre de la CSRD, tant la feuille de route est dense pour une entreprise qui n’avait jusqu’à présent jamais été soumise à une obligation de reporting extra-financier.

Pour les entreprises qui découvrent le reporting de durabilité, le manque d’expérience et, par là même, d’habitude de collecter des données ESG, de disponibilité de ces données, de process pour les collecter, mais aussi de culture et d’organisation dédiée, constituent de réelles difficultés. Les anticiper au plus tôt a été vraiment bénéfique ! Qu’il s’agisse de se doter des moyens nécessaires à la réussite de chacun des projets, tant en termes d’organisation qu’en termes humains et de moyens, ou encore d’embarquer la gouvernance, les directions supports et opérationnelles et les lignes managériales et de mobiliser les partenaires de la chaine de valeur.

Cette anticipation a aussi permis de mettre en place des synergies avec les cadres de reporting déjà utilisés comme ceux d’Ecovadis ou du CDP. Elle a aussi permis de bien appréhender la notion de progressivité de la mise en œuvre du reporting, tant avec le cabinet de conseil et éditeur choisi, qu’avec les auditeurs. Enfin, elle a aussi permis de s’inscrire dans un mouvement dans lequel les pairs et les partenaires sont engagés, avec une volonté commune de coconstruire.

Il a par ailleurs été relevé que lorsqu’une entreprise a une démarche RSE structurée, intégrée dans la stratégie d’entreprise, avec des objectifs et des indicateurs clés de performance en place, la CSRD est un véritable catalyseur. L’analyse de double matérialité permet de challenger, de revisiter et finalement va permettre d’agir plus efficacement et avec plus d’impact. Une des grandes vertus de la CSRD est de promouvoir la transversalité de la durabilité au sein de l’entreprise et avec les partenaires de la chaine de valeur.

Quant à la gouvernance, l’anticipation a permis de sensibiliser très en amont les différents organes et comités. Evoquer, à chaque réunion la CSRD, a été un élément clé de l’acculturation des membres des COMEX et CODIR, pour lesquels des séquences de sensibilisation et formation ont été mises en place. Au final, pour chacune des entreprises qui témoignaient de leur expérience, des membres du COMEX participent aux Comités CSRD.

L’analyse de double matérialité a bien évidemment été évoquée pour son rôle prépondérant dans la mise en œuvre de la CSRD. Opportunité unique et enrichissante de dialoguer avec les parties prenantes sur des sujets de durabilité, elle permet d’identifier les Impacts, Risques Opportunités matériels qui vont structurer toute la démarche de durabilité et les plans d’action qui vont engager les entreprises dans la transformation durable de leur modèle d’affaires.

Enfin, cette table ronde a abordé l’épineuse question du défi des données. Sachant que la notion même de reporting est un repoussoir, voire anxiogène. Les données existent-elles, où sont-elles, sur quels supports, sont-elles complètes, collectables, fiables, garantes de la transparence requise, vérifiables et quelle gouvernance de la donnée adopter ?

Collecter des données ESG au sein d’une entreprise internationale ne pouvait s’imaginer sur des tableurs Excel. L’anticipation a permis de sélectionner la solution logicielle qui allait permettre de répondre aux exigences de la CSRD. En l’espèce, faute d’expérience antérieure (NRE, art 225 et autre DPEF), l’anticipation permet d’aborder plus sereinement la nécessaire acculturation au reporting, l’organisation à mettre en place, le process de reporting à formaliser en insistant sur la phase contrôle des données.

Pour conclure ce retour d’expérience, ce reporting de durabilité est aussi apparu comme une opportunité à ancrer dès le début dans le change management qui doit faciliter la mise en œuvre de la transformation durable du modèle de l’entreprise. A noter également sur le chapitre de la donnée, que Traace proposait une table ronde intitulée « Comment RATP Dev pilote ses données ESG et son impact carbone. »

 

 

(*) dont 72% d’ETI, 18% de grandes entreprises et 10% de PME.

(**) Patricia Savin, Avocate associée – DS AVOCATS ; Emmanuel THIERRY, Associé / Global CSRD Task Force Leader – FORVIS MAZARS ; Olivier ARTHAUD, Associé Fondateur – ARTHAUD & ASSOCIES ; Thomas GUYOT, CO-CEO TRAACE – TRAACE / TENNAXIA ; Solène GARCIN-CHARCOSSET, Directrice de la Business Line RSE – TENNAXIA ; Bertrand Desmier, Senior advisor – Tennaxia.

(***) Anne Cheurlin, Directrice HSE et RSE – DELPHARM ; Chloé Vinel, Head of CSR Group – TALAN ; Alexandra Mannaï, CSR Director and Chief Transformation Officer – GREENYELLOW ; Solène Garcin-Charcosset, Directrice de la Business Line RSE – TENNAXIA ; Bertrand DESMIER, Senior Advisor – TENNAXIA.

 

Article rédigé par :

Bertrand Desmier